mercredi, avril 10, 2013
Son premier film, Primer, m'a vraiment marqué, à tel point que je ne pense pas avoir encore fini d'en faire le tour (même si les graphiques dispos en ligne aident bien), et j'attends son deuxième, Upstream Color avec impatience. Shane Carruth se dévoile un peu dans cet article de Wired et le personnage lui-même semble aussi fascinant que son (ses ?) films. On regrette vraiment qu'il n'ait pas pu tourner A Topiary, son épopée de SF qui s'annonçait super alléchant, et on s'attend à un degré de perplexité jamais atteint devant un film durant le visionnage d'UpstreamColor.
Nul doute qu'on va avoir droit ensuite à un flot de théories sur la signification du film (un peu comme ce site sur Primer) et peut-être même à un film, comme ce Room 237 qui donne la parole à des théoriciens (parfois bien branques) qui expliquent leur vision du chef d'oeuvre de Kubrick: Shining. Certaines théories sont farfelues, d'autres fascinantes, mais ce que ce docu montre finalement, c'est de quelle façon on peut se perdre dans une oeuvre (comme le font ceux qui s'expriment là, mais également ceux qui dessinent des graphiques temporels pour expliquer Primer).
Dans un registre plus fun, le dernier Don Coscarelli, John Dies at the end, malgré certains parties un peu en baisse de régime, est super enthousiasmant. Une sorte de mix entre Constantine et l'esprit de Buckaroo Banzaï, adapté d'un roman sérialisé et publié sur le net. Du vrai pulp, quoi...
mardi, mars 26, 2013
Ne pouvant résister à un bon mot, au risque de passer pour un connard, quand La Brigade Chimérique est sortie, j'ai dit à Lehman que sa série était à La Ligue des Gentlemen extraordinaires ce qu'Indochine était à The Cure.
C'était méchant et drôle, mais surtout faux.
D'abord parce que l'idée de reprendre des personnages de la littérature, qu'elle soit populaire ou non, Moore l'a piquée à Farmer et Leroux faisait déjà probablement la même chose lorsqu'il mettait Sherlock Holmes dans les pattes de Lupin.
Ensuite parce que les derniers tomes de la Ligue n'ont pas grand intérêt. Moore et O'Neil s'amusent à blinder leurs planches de références, mais ils sont les seuls à y prendre du plaisir.
Tandis qu'avec La Brigade, puis Masqué et L'Homme Truqué, Lehman crée un mythologie des super-héros français totalement cohérente et avec un véritable propos.
Revendiquer et réhabiliter l'héritage de la SF et de la littérature populaire française est un de ses dadas, mais le faire par la fiction plutôt que par l'essai ou la théorie, c'est brillant. Quel bonheur de voir un drapeau français sur la couve du dernier tome de Masqué. Pas à cause d'un patriotisme mal placé, mais parce que la réluctance des auteurs à utiliser en général de tels symboles (alors que les drapeaux anglais sont dans toutes les vitrines de de magasins d'ameublements de merde et les croix gammés sur 35 bédés sorties l'année dernière) part, il me semble, d'un mauvais constat. Ce n'est pas d'un nationalisme excessif que d'utiliser le symbole du pays où l'on vit pour illustrer des histoires. Il est peut-être même temps de se le réapproprier (et l'associer à des super-héros me semble une façon de faire très positive en ce sens) plutôt que de laisser ce genre d'emblème aux mains des décérébrés de la manif pour tous (sauf les pédés!) et du FN.
Mais je m'égare.
Tout ça pour dire que le boulot en bédé de Lehman, c'est chouette, et quand il en parle, c'est brillant...
Finalement, Nicola Sirkis a peut-être plus de barbe que Robert Smith.
lundi, mars 25, 2013 Sugarman, le documentaire sur Sixto Rodriguez partait gagnant. Le sujet est incroyable et même si le film fait judicieusement (ou de façon malhonnête) l'impasse sur la tournée australienne du gus au début des années 80, il reste impressionnant. Un ouvrier du bâtiment de Detroit, quasi-SDF, est une star incroyable en Afrique du Sud grâce aux deux albums qu'il a sorti dans les années 70. Ses fans le croient mort et lui ignore totalement qu'ils existent. Il y a là matière à une histoire à sensation sur les dangers de la gloire et de la notoriété, mais le personnage est tellement "autre", a tellement les pieds sur terre et s'est tant frotté à la vraie vie, qu'il prend tout ça avec un cool qui ferait passer Fonzie pour une Femen dans la cathédrale de Séville.
Pour ne rien gâcher, la musique est superbe.
J'ai beaucoup pensé, en regardant le film, au versant sombre de la même histoire, The Devil and Daniel Johnston, tout aussi fascinant, mais bien moins gai.
Et puis aussi au disque maudit de Nick Garrie, jamais sorti, mais tout aussi beau dans le genre arrangements sirupeux seventies.
15:35
mercredi, mars 20, 2013
Brian Vaughan et Marcos Martin sortent une nouvelle bédé, The Private Eye, qu'ils vendent eux-même en laissant aux internautes choisir le montant qu'ils veulent donner. Une initiative tellement logique (Radiohead l'a fait il y a déjà longtemps) qu'on se demande pourquoi elle n'a pas déjà été lancée par d'autres (c'est peut-être le cas, mais sans doute pas par des gens aussi connus que Vaughan). Le format est adapté aux écrans et le modèle pensé en fonction de la seule publication numérique.
Visiblement, ça marche très bien. Et aucun éditeur n'avait encore pensé à se lancer dans ce genre d'initiative qui, commercialement parlant, me semble pourtant, d'une simplicité et d'une logique absolue. C'est dans l'ordre des choses, dirons-nous.
Pour ceux qui l'ignorent, rappelons que Vaughan est le scénariste de Y, The last man, qu'il a bossé sur la série Lost et qu'il publie actuellement une nouvelle série, Saga, qui vient de sortir chez Urban (traduite par bibi).
Alors évidemment, il plus facile pour lancer ce genre d'initiative quand on s'appelle Vaughan que Queyssi. Mais quand on voit le succès du kickstarter lancé par Fred Boot pour son projet d'histoires courtes nostalgiques, on se dit que ça peut marcher aussi à plusieurs niveaux. (Au passage, jetez un oeil sur les extraits, ça risque de vous donner envie.) Sans porter de jugement de valeur, Fred est moins connu que Vaughan, mais il a appâté suffisamment de lecteurs potentiels pour faire un carton sur son projet. J'attends d'ailleurs mon exemplaire avec impatience.
Tout cela ouvre des possibilités: financer le projet dont aucun éditeur ne veut, mais qui pourrait intéresser suffisamment de lecteurs pour s'auto-financer avec des contreparties - en parallèle avec des projets plus grand public chez des éditeurs ?
La traduction de ce roman de SF génial trop méconnu ? La bédé en noir et blanc sur le rock ? Le roman sur la musique qu'aucun éditeur ne juge vendable, mais que tout ses lecteurs trouvent bon ?
L'équation reste tout de même compliquée. Comment batir un public assez nombreux pour parvenir à financer le projet ? Qu'offrir en contrepartie ? (ça, c'est plus facile lorsqu'on est dessinateur, mais pas impossible non plus).
Des possibilités, donc. Mais aussi des risques. Une relation à nouer avec ses lecteurs. Un travail en amont sur le projet pour cerner son potentiel. Un nouveau modèle ponctuel.
Des perspectives.
11:25
jeudi, mars 14, 2013
Le post d'hier a entraîné un énorme afflux de visites sur ce blog.
Comme il fallait s'y attendre, les retours sur la planche de Greg sont enthousiastes. Et pour en avoir un paquet d'autres sur mon disque dur, je peux vous assurer que vous n'avez encore rien vu.
Ce matin, sur Facebook, le Lombard a posté une nouvelle planche.
Je suis donc en pleine écriture du tome 2 de la Section Infini et je termine également un roman jeunesse.
En attendant, on peut voir ma bobine ce soir dans Plus ou moins geek. J'y parle de Iain Banks.
A Paraître en
2014, aux éditions du Lombard, Section ∞, une série de Laurent Queyssi et Greg
Tocchini.
Depuis 1908, la Section ∞ a rencontré l’étrange,
le merveilleux et l’horrible de nombreuses fois.
Et jusqu’à aujourd’hui, vous n’en avez rien su.
To be published
in 2014 by éditions du Lombard, Section ∞, a comic book series by Laurent
Queyssi and Greg Tocchini.
Since 1908, the
section ∞ has often encountered the bizarre, the supernatural and the horror. And up to now, you knew nothing about it.
C'est avec un grand plaisir que j'annonce enfin la bande dessinée sur laquelle je travaille depuis longtemps déjà. Section ∞ est une série fantastique/SF dessinée par l'excellent Greg Tocchini, un Brésilien qui travaille habituellement pour le marché américain (vous avez peut-être lu son Last Days of American Crime). Chaque page reçue est un enchantement...
jeudi, mars 07, 2013
Je lutte encore contre le trou noir de travail qui risque de m'engloutir, mais les choses s'améliorent un peu. J'ai rendu des choses - je ne suis pas sûr de pouvoir en parler et j'approche de la fin du roman en cours d'écriture (avec tous les doutes et toutes les interrogations que cela entraînent). Je n'ai jamais été très sûr de moi et de mon travail (surtout pendant que j'écris), mais je pensais que les choses s'amélioreraient avec le temps, que je prendrai de l'assurance avec l'expérience. Ce n'est pas le cas.
Sur les conseils avisés de Momo, j'ai lu le premier volume du Uncanny X-Force de Remender. Et c'est vrai que c'est bien. Bien construit, surprenant, drôle, avec des dialogues qui font mouche. Contrairement à la rencontre entre les deux Spider-man (Morales et Parker) de Bendis qui me semble un gros flop. Ça faisait des années que je n'avais rien lu de Marvel ni de Bendis, mais je pense n'avoir rien loupé. Le scénariste vedette de la firme continue ses dialogues soit-disant naturels (va relire du Mamet, coco, on en reparlera) plaqués sur des intrigues aussi fines qu'un mannequin anorexique. En revanche, Sara Pichelli, elle déchire, elle.
Vu Argo. Pas mal pour un téléfilm. On ne passe pas un mauvais moment, mais ça reste tout de même assez creux, sans véritable idée et doté d'un suspense vraiment artificiel. Ben Affleck fait une bonne imitation de Warren Beatty dans A cause d'un assassinat.
Je passe sur Michael Parks qui joue un Jack Kirby apportant des dessins (importantissimes dans l'intrigue) qui ne sont pas de Jack Kirby. N'accablons cette pauvre production qui n'a sans doute pas eu les moyens de se payer les droits de reproduction de quelques planches du King.
Reçu le MBV. Pas encore assez écouté. L'impact est moindre que le précédent. Forcément, je n'ai plus seize ans...
Puisqu'on est dans les perdreaux de l'année, j'écoute aussi l'album de Johnny Marr en ce moment. Le roi du riff a écrit quelques pop songs sympas, mais ne retrouve pas les hauteurs d'antan. Reste New Town Velocity, le meilleur morceau de l'album, au riff presque aussi bon que We Share the same skies des Cribs. Et tout ça est toujours bien meilleur que les disques de ce vieux trouduc de Morrissey.
Rayon nouveautés, j'adore l'album des londoniens de Cheatahs signés, comme par hasard, chez des anciens de Creation...
mercredi, février 13, 2013
Lu Gun Machine, le deuxième roman de Warren Ellis, un polar qui se retient d'être un roman de SF même si on sent parfois que l'auteur a bien envie de plonger franchement (mais qui, de nos jours, peut écrire de la SF avec la moindre ambition commerciale à part deux ou trois gars qui font du space op' et déjà installés ?). L'idée de malade à la base du roman - on retrouve une cache d'armes, des centaines, ayant toutes servies dans des meurtres non élucidés - est bien menée jusqu'au bout dans une sorte de trip urbano-amerindiano-boursier qui se tient. Là où je trouve que ça pêche un peu plus, c'est dans le traitement du personnage principal, très plat, et dans la énième dynamique de trio qu'utilise Ellis. Il sait faire, mais justement, on sent qu'il ne prend pas de risques. Voilà, au final, c'est cette impression qui domine. Celle d'un gars qui a écrit pour le marché, pour plaire, pour entrer dans la liste des best-sellers du NY Times (on y entre une fois, a-t-il expliqué, et on est pour toujours un NY Times best-sellers author). Ça a marché. Bien joué, mais maintenant, on aimerait qu'Ellis ose un peu plus. Ou il faudrait peut-être que je révise mes attentes vis à vis de lui.
On passe un très bon moment, hein, n'allez pas croire le contraire, mais j'attendais, peut-être à tort, beaucoup plus d'Ellis que ce super épisode à concept des Experts Manhattan.
Et je reste dans l'idée qu'il devrait écrire de la SF futur proche, avec toutes les idées tarées et autres concepts qui sont sa matière, ça fonctionnerait sans doute bien mieux. On verrait sans doute moins les défauts.
Lu aussi Souvenirs de l'Empire de l'Atome, la bédé de Smolderen et Clérisse sur un personnage qui ressemble beaucoup à Cordwainer Smith. C'est très beau, très référencé, sans doute très profond, mais passée la contemplation béate de l'univers dépeint, on s'emmerde tout de même un peu dans une narration qui glisse sans aspérité, sans véritable enjeu. Ça ressemble à une version ultra léchée et 50's SF de la pub Herta avec le papy qui apprend au gamin à faire une roue dans l'eau (flute de pan incluse). On s'y sent bien, ça ne nous décalamine pas les recoins, mais on s'en branle un peu, au fond, de savoir faire une roue dans l'eau. Si nous étions en 82 dans Métal Hurlant, j'aurais simplement écrit: "Beau, mais chiant".
Lu aussi le Bifrost spécial Rock. J'adore Comballot, mais son intro visant à la réhabilitation du rock prog en l'opposant à l'autre rock, celui des néandertaliens binaires, est aussi fin et juste qu'un amendement UMP à propos de la loi sur le mariage pour tous. Et ne parlons pas de sa liste des 100 disques rock SF.
La période de folie continue. Légère grippe ou assimilée (merci la maternelle) et du boulot par dessus la tête. De la trad (encore du Morrison, ouais!), du roman, de la bédé. Demain, je fais un aller-retour à Paris, histoire d'accumuler encore un peu plus de fatigue et d'avoir plein de travail à rattraper ce week-end.
16:29
dimanche, février 03, 2013
Passons en vitesse sur Willem, le grand prix d'Angoulême, tout ça. Vous savez ce que j'en pense. C'est tous les ans pareil.
Je suis tout de même étonné que le résultat des votes des auteurs ait donné Toriyama. Toriyama, quoi! Docteur Slump et Dragon Ball. Ok, les mecs, d'accord, j'ai du mal à comprendre. Mais bon, je ne suis jamais content. Un coup trop snob, un coup trop populo.
Comme pour compenser, My Bloody Valentine a sorti son nouvel album aujourd'hui. On ne l'attendait que depuis 1993. Je n'ai pas trop réfléchi, j'avoue. J'ai fait péter Paypal et j'ai acheté le combo vinyle, CD, MP3 sans attendre d'en écouter une seconde. Je n'en ai pour l'instant passé que la moitié. Je suis bien évidemment déçu et enthousiaste, emporté et dégoûté. Je vais adorer ce disque. Je vais même le détester. Je vais regretter qu'il ne soit pas rose et ne soit pas exactement Loveless. Exactement les raisons pour lesquelles je vais le vénérer.
Bref, My Bloody Valentine a sorti son album.
Beaucoup d'entre nous n'ont pas touché le sol aujourd'hui.
Semaine infernale terminée. Dernier jour de tournage de Plus ou moins geek mercredi, suivi de la fête de fin de tournage réglementaire. Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, mais s'il n'y a pas d'autres saison, je regretterai beaucoup de ne plus revoir régulièrement cette bande de tarés.
J'ai enchaîné sur une journée d'Angoulême. Trop court, trop de monde à voir, trop de rencontres à l'improviste qui tourne court parce que "on m'attend là", "on se recapte dans cinq minutes" et autre phrases sincères, mais oubliées trente secondes plus tard dans le tourbillon.
Vu la chouette expo Andréas (forcément) où l'on se rend compte que le gars maîtrise une chiée de technique. Vu aussi pas mal de collègues dont la bande de traducteurs de comics au quasi grand complet (Jim Lainé se cachait sans doute), François, Serge Lehman (dans un courant d'air) qui m'a lancé un "c'est une belle période pour être auteur!" qui en ferait rire ou pleurer certains, mais qui m'a bien plu, moi, et puis des éditeurs, des vieux potes avec lesquels on se dit toujours "faut vraiment qu'on bosse ensemble" et j'en oublie évidemment un milliard.
C'était Angoulême, quoi. Sous la pluie. Et pas assez longtemps.
Maintenant, je vais essayer de finir mon boulot en cours sans devenir fou.
Et j'ai un disque à écouter...